Chapelle de l'Ecot Bonneval sur Arc

Les vacances : un temps pour imiter Dieu !

Chapelle de l'Ecot Bonneval sur Arc

L’apôtre Paul écrit à la communauté d’Ephèse : « Oui, cherchez à imiter Dieu, comme des enfants bien-aimés, et suivez la voie de l’amour, à l’exemple du Christ qui vous a aimés et s’est livré pour nous, s’offrant à Dieu en sacrifice d’agréable odeur. » (Eph 5, 1)

« Imiter Dieu », cela ferait un beau programme de vacances…

Ce pourrait être d’abord comme le temps du septième jour, ce jour où Dieu chôma, après tout l’ouvrage qu’il avait fait. Un temps pour s’arrêter de courir. Tout au long de l’année, on court sans cesse parce qu’on a mille choses à faire à la fois. On court, et tout ça pour gagner du temps qu’on perd tout aussi vite d’ailleurs. Les vacances, ce pourrait être justement l’occasion de perdre son temps, comme cela, volontairement, gratuitement, pour soi, pour les autres, pour Dieu ; prendre son temps pour tous ceux et celles qu’on ne voit pas le reste du temps, tellement on court vite. Peut-être même que c’est en famille qu’il fait bon de perdre un peu son temps ainsi.

 

Ce pourrait être aussi comme le temps des six jours précédents, ces jours où Dieu ne cesse de s’émerveiller : « Oh comme je vois que cela est bon…et même très bon ! » Il dit cela du ciel et de la terre, de la mer et des eaux de pluie, des plantes et des animaux, de l’homme et de la femme. Les vacances comme un temps pour admirer, pour ouvrir les yeux de façon neuve et regarder le monde comme s’il venait de naître, le regarder comme si soi, on venait de naître. C’est une fleur dans le jardin, un ruisseau qui serpente dans la mousse ou une mare qui stagne, le regard d’un homme, d’une femme, le sourire d’un enfant : admirer ce qu’on a chaque jour sous les yeux et qu’on avait voilé de ses jugements hâtifs et défiguré de ses amertumes accumulées. Le temps d’admirer Dieu, aussi. Admirer Dieu, c’est sans doute ce que veut dire contempler ; cela veut dire voir plus loin, ou se laisser voir de tout près par Celui qui est tout amour et tendresse et vie. La prière n’est peut-être pas plus difficile que cela parfois : ouvrir les yeux et le reconnaître, et se laisser séduire et balbutier ébahi comme Jean sur le bord du lac de Tibériade : « C’est le Seigneur ». La prière, c’est juste un peu de temps qu’on perd pour Dieu. Le rythme de l’été est peut-être un bon rythme pour retrouver le temps et le goût de prier.

 

Ce pourrait être encore comme ce temps où Dieu bénit. « Soyez féconds et multipliez-vous » dit le Seigneur à la terre et aux arbres fruitiers et aux animaux et à l’humanité. Bénir, c’est dire du bien ; des autres surtout. Cela veut dire lâcher les vieilles rancunes et les mots qui tuent, c’est laisser tomber les masques dont on affuble les autres et soi-même aussi parfois. Bénir, c’est dire des mots de vie, des mots de résurrection, des mots de bonheur. Les mots n’ont pas toujours besoin de s’articuler pour prendre sens : un souffle suffit pour en dire la magie et la vie. Un geste suffit pour faire naître la vie. Le temps de l’été dit à sa manière comme la vie est débordante autour de nous. C’est comme une invitation au partage.

 

Ce pourrait être encore comme ce temps où Dieu cherche l’homme : « Adam, où es tu ? ». Les vacances comme un temps pour chercher, un temps pour attendre. Cela veut dire en clair un temps pour se décentrer de soi. Se mettre en vacances, c’est se mettre à attendre l’autre. « Mon cœur est sans repos tant qu’il ne repose en Toi » disait saint Augustin. Alors il faut l’attendre et le guetter au bout de ses rêves, au sommet de la montagne, au fond de la mer, au fond de soi même. Alors il faut l’attendre et le guetter du sommet de sa joie ou du fond de sa tristesse, le guetter quand justement on pense qu’il n’y a plus rien ni personne à attendre, ou quand on pense qu’on a tout et qu’on n’a plus besoin de rien ni de personne. C’est là qu’il est temps de se mettre en vacances, et c’est même urgent. Les vacances, c’est en effet un bon temps pour s’apercevoir qu’on est « crevé », donc pour voir ses limites, les assumer et peut-être même se réconcilier

avec elles. Cela devient alors temps de ma liberté, passage de la Mer rouge, libération de mes habitudes quotidiennes où je peux rencontrer des gens, des frères, des soeurs et faire un bout de randonnée avec eux, ou simplement m’asseoir avec eux à l’ombre d’un grand saule. Ce peut être aussi avec Dieu, si c’est avec Lui que je veux prendre un peu de temps pour me balader. « Souviens toi de marcher humblement avec ton Dieu », dit le prophète. C’est la marche de la rencontre de Dieu avec les hommes, de l’alliance de Dieu avec les hommes, qui occupe tout son temps depuis le matin du septième jour.

 

Le temps de l’été, c’est aussi le temps où on est un peu moins stressé par le lendemain, par son travail, par une rencontre à préparer, par un rendez-vous sérieux où la négociation sera difficile, par que sais-je encore…Le temps de l’été permet davantage de vivre l’aujourd’hui sans être sans cesse tendu vers demain. Vivre le temps présent. Le temps de l’aujourd’hui. 369 emplois du mot aujourd’hui dans la traduction de la Bible de Jérusalem. Mais seulement une dizaine d’emplois sur les lèvres de Jésus.

« Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Ecriture que vous entendez de vos oreilles » (Lc 4, 21)

« Aujourd’hui le salut est arrivé pour cette maison » (Lc 19, 9)

« Aujourd’hui tu seras avec moi au paradis » (Lc 23, 43)

 

C’est l’aujourd’hui de la rencontre de Dieu dans sa Parole ; l’aujourd’hui de la conversion ; l’aujourd’hui de l’accueil de la grâce. Un beau programme de vacances, non pas pour se laisser vivre, mais pour décider de vivre de cette vie qui est à Dieu. Sans oublier, aux quatre coins du monde, tous ceux et celles pour qui l’été sera encore filé de misère, de guerre et de peur.

Frère Jean-Luc Marie FOERSTER, op
Directeur du Pèlerinage de la région Poitou Vendée Loir-et-Cher